OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les 150 millions égarés de la République http://owni.fr/2012/11/14/les-150-millions-egares-de-la-republique/ http://owni.fr/2012/11/14/les-150-millions-egares-de-la-republique/#comments Wed, 14 Nov 2012 12:48:13 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=125768 Owni a extrait une liste partielle des bénéficiaires de 150 millions d'euros accordés au titre de la réserve parlementaire, où apparaissent de potentiels conflits d'intérêt. En partenariat avec l'association Anticor, et en attendant la publication intégrale de ces dépenses discrétionnaires, nous proposons à chacun de se plonger dans ce document. Après l'avoir épluché.]]>

Mise à jour, 16 novembre à 18h10
Le député Jean-Michel Couve, cité dans cet article, nous a recontacté pour donner suite à notre article. Lire sa réaction.

150 millions d’euros échappent chaque année à la publication du budget. Sous le titre de “programme 122″ (concours spécifiques et administration) et de multiples programmes ministériels, environ 60 millions sont ainsi attribués et dépensés par les sénateurs et 90 millions par les députés sans que soit publiée la liste des enveloppes ni le reçu des sommes engagées. Faute de disposer d’un document intégral, Owni s’est tourné vers l’annexe au projet de loi de Finances 2013 [pdf] portant sur “l’effort financier de l’État en faveur des associations”, un des deux postes de dépense autorisé pour la réserve parlementaire avec les investissements pour les collectivités locales. En “scrapant” ce document pour récupérer les données correspondant à l’objectif “réserve parlementaire” pour l’année 2011, nous avons pu reconstituer une liste partielle mais riche d’informations des récipiendaires de ce mystérieux programme. Nous vous la restituons ci-dessous et vous invitons à la consulter en document partagé sur Google Drive, liste classée par ordre alphabétique des associations ou par ordre décroissant de montant.

Parti associé de l’UMP

Notre consœur de Mediapart Mathilde Mathieu avait déjà révélé la façon dont le sénateur Grosdidier avait subventionné son propre club de réflexion par l’injection de 60000€ de sa propre réserve parlementaire en 2011. Révélation qui avait valu le dépôt d’une plainte pour prise illégale d’intérêt. A la lecture de l’interminable document que nous avons reconstitué, les conflits d’intérêts émergent.

Au titre de la réserve parlementaire 2011 apparaît ainsi une enveloppe de 50 000 € au nom du “Mouvement initiative et liberté”. Selon la plaquette de ce club politique [pdf], sa création le 16 décembre 1981 répondait à un objectif :

Il s’agissait d’empêcher que les socialo-communistes, après s’être emparés du pouvoir politique, ne mettent définitivement la main sur les esprits et sur les structures de notre pays. Il n’existait pas d’organisation adaptée à ce genre d’action : c’est ce vide que le MIL a voulu combler.

Le site officiel répertorie parmi ses inspirateurs de Gaulle, le général de Boissieu et Jacques Foccart, figure notable de la Françafrique et du Service d’action civique, dissout l’année de la création du MIL. Contacté par Owni, le mouvement n’a pas souhaité répondre à nos questions sur la réserve parlementaire :

Vous croyez vraiment que je vais répondre à une question pareille ?
— C’est votre droit. Et pensez-vous que je puisse avoir des détails sur le statut du Mil vis-à-vis de l’UMP ?
— Il faut aller voir sur le site.

Moins réticent, le site nous apprend que le Mil est un “parti associé à l’UMP” qui, à ce titre, peut disposer de représentants dans son bureau politique. 50 000 € d’argent public ont donc été attribués, en 2011 et en toute discrétion, à un club politique disposant de ses entrées au sein du parti majoritaire à droite.

Sous le titre incomplet de “Association developp durable territoire” se dissimule un autre cas notable. Mais à 130 000 € celui-là. Suivant le numéro Insee, il s’agit en fait de l’association de développement durable du Territoire Maures, à la Garde-Freinet (depuis déménagée à Saint-Tropez) . Laquelle a pour président Jean-Michel Couve, député UMP de la 4è circonscription du Var, qui en fait même une longue mention accompagnée d’une vidéo sur son blog. L’association se fixe notamment pour objectif la rédaction d’un Schéma de développement durable du tourisme. Un sujet que le député Couve traite par ailleurs au sein de son parti, puisqu’il est secrétaire nationale en Charge de l’Hôtellerie-restauration et des Loisirs de l’UMP.

“Personne ne vous parlera”

Dans un autre genre, les 10 000 € accordés au Lion’s Club de Conflans-Montjoie prennent un relief particulier quand on note sur le site de l’association que son président, Claude Ney, est directeur de cabinet chez Arnaud Richard, député UMP des Yvelines (le risque d’homonymie étant écartée à la lecture d’un article de presse local signalant la visite du député à l’association auprès de son assistant).

En survolant les 1 243 lignes du fichier, la majorité des organisations tombent néanmoins dans les grandes catégories de la vie associative : caritatif (les Restos du cœur et la Croix-Rouge reçoivent les plus grosses enveloppes), aide à l’emploi, à la jeunesse et à la famille, associations mémorielles (fondation Charles-de-Gaulle en tête) et activités culturelles et sportives diverses. En regardant de plus près, certains surprendront également quelques organismes de gestion de l’enseignement catholique (OGEC) et associations de chasseurs.

La qualité du fichier laisse cependant à désirer. En colonne “Objet”, nous avons laissé les mentions du fichier PDF original, lesquelles nous apprennent que, dans certains cas, la réserve parlementaire ne représente qu’une partie des dons ministériels (dont le montant n’est pas toujours précisé). Le total des montants que nous avons pu réunir est donc certainement bien inférieur. Le plus gros problème étant qu’il ne s’élève qu’à un peu plus de 10 millions d’euros, soit un quinzième du montant de la réserve. 140 millions sont toujours intraçables.

Pour trouver les sous manquants, nous nous sommes tournés successivement vers l’Assemblée, le ministère de l’Économie et le ministère de l’Intérieur. La première réponse devint un refrain à nos requêtes :

Personne ne vous parlera.

Au fil des jours et mêmes des mois (les premiers contacts ayant été pris avant l’été), le doux parfum d’omerta semblait embaumer du Palais Bourbon à Bercy, passant même la Seine jusqu’à la place Beauvau. Contactés et relancés par nos soins, aucun des deux cabinets ni des services techniques associés n’ont donné suite à deux simples questions : existe-t-il une base compilant les montants de la réserve parlementaire ? Existe-t-il un interlocuteur pour nous parler du système ? Renvoyés à nos chers tableaux, nous nous sommes vus plusieurs fois répliquer que le sujet était “trop technique” et même, par un fonctionnaire du Trésor, que les auteurs des “Jaunes” ne répondaient “jamais aux journalistes, ne cherchez pas”.

Corruption

L’analyse de ce fichier et ses insuffisances imposent cependant quelques constats : les sommes utilisées de façon discrétionnaires le sont parfois dans des cadres qui recoupent clairement la définition du conflit d’intérêt. Quand ce n’est pas le cas (comme pour l’écrasante majorité des bénéficiaires), il s’agit de subventions pour des missions d’intérêt général (aide à l’emploi, l’enfance, l’éducation, l’insertion, etc.) normalement prises en charges par les collectivités ou l’État et donc de circuits détournés d’aide publique. Lesquels donnent parfois lieu, comme c’est le cas pour le député Grosdidier, à des détournements à des profits politiques.

Engagée dans la lutte anticorruption, l’association Anticor tente d’alerter sur le sujet depuis maintenant plusieurs années, comme le souligne son secrétaire général, Pierrick Prévert :

Sur la réserve parlementaire, notre action vise surtout à la mobilisation et à l’information. À l’occasion des dernières législatives, nous avons fait signer la charte Anticor des engagements des candidats à la députation qui engage ses signataires à, notamment, “mettre un terme à la pratique féodale de distribution opaque et inéquitable de la réserve parlementaire”.

Cette démarche reste cependant isolée et les propositions pour lutter contre cette pratique ou bien l’encadrer, ne serait-ce que par la publication de ses comptes, tombent régulièrement dans l’oubli ou le consensus mou. Annonçant son intention de réformer le système, promettant la publication des données, le nouveau président de l’Assemblée, Claude Bartolone, n’a en fait donné comme instruction aux parlementaires socialistes que de limiter l’enveloppe et de respecter les délais administratifs, ainsi que d’éviter les petites subventions. Du côté du rapport Jospin, les mesures “techniques” s’accumulent sur les élections mais les mots “réserve parlementaire” n’apparaissent pas plus que le fameux “programme 122″. Non sollicité par la commission, le secrétaire général d’Anticor regrette ces piétinements :

Chaque petit pas est encourageant, et ces propositions vont incontestablement dans le bon sens mais il est très difficile de s’enthousiasmer tant elles sont en demi-teinte. Le rapport Jospin a 10 ans de retard. Il préconise la fin du cumul avec un mandat exécutif local. Sur le même sujet, la position d’Anticor qui n’est pas franchement révolutionnaire est : interdiction du cumul dans le temps (pas plus de deux mandats successifs), interdiction du cumul avec des mandats exécutifs, mais aussi avec des fonctions exécutives.

Parmi les quelques députés à s’être intéressés au sujet, feu Patrick Roy avait avancé la proposition de proportionner cette aide aux revenus des circonscriptions [pdf] (proposition tombée dans l’oubli une fois dépassé le délai légal de constitution d’un groupe de travail sur le sujet).

Crowdsourcing

Dès lors, il n’y a que deux options face à la situation : soit la réserve parlementaire est illégale car relevant de pratiques que la République réprouve, auquel cas elle devrait être supprimée. Soit elle relève d’une “aide aux collectivités territoriales”, comme l’avançait la députée Marie-Françoise Pérol-Dumont, auquel cas, elle doit être publique dans ses attributions comme dans ses dépenses.

Dans l’attente d’une démarche d’Open Data sur les montants attribués et dépensés dans ce cadre, qui nous apparaît comme la seule démarche logique quant à l’usage des deniers de l’État, Owni s’associe à Anticor pour inviter les citoyens à nous aider dans notre exploration des données déjà collectées. Sur la base du fichier constitué à partir des annexes du projet de loi de Finances, nous mettons à disposition le formulaire ci-dessous afin que chacun puisse, anonymement, signaler des liens dont il aurait connaissance entre une association bénéficiaire et un parlementaire ainsi que la source sur laquelle il s’appuie.

Au fil des jours, nous vérifierons et interpellerons les élus concernés ainsi que les associations. Nous réaliserons à partir des données recueillies des outils permettant de visualiser l’usage de la réserve ainsi que des systèmes de recherche pour faciliter l’accès aux informations contenues dans ces documents. Si nous venions à nous procurer des données complémentaires, elles seraient mises à disposition du public sur Owni et sur le site d’Anticor.

Ce projet ouvert sera mis à jour au fil des contributions et des découvertes. À moins que la décision ne soit prise de publier l’intégralité des attributions et de l’usage de la réserve parlementaire depuis ses origines.


Vendredi 16 novembre à 17h40, Jean-Michel Couve a recontacté Owni pour donner suite à nos questions. Il a confirmé être toujours président de l’association et être à l’origine de la subvention de 130 000€ qui lui a été versée au titre de la réserve parlementaire en 2011 :

Cette association existe depuis 10 ans et, du fait de l’absence de subvention (en dehors des cotisations des mairies membres), nous avions le choix entre tout arrêter ou faire une demande. J’ai donc décidé de verser l’intégralité de ma réserve pour l’année 2011 à cette association qui concentre son action sur une partie spécifique du territoire du Var : le dossier a été instruit par le groupe puis par les services de l’Etat, le ministère de l’environnement en l’occurrence, et personne n’y a rien trouvé à redire.

Interrogé sur l’usage de la réserve parlementaire, le député de la 4è circonscription du Var a défendu le système au nom des “multiples associations qui, depuis des années, ne survivraient pas sans les moyens alloués par ce biais”.


Photo par wand3rl0st[CC-byncnd]

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L’argent caché d’Ennahdha http://owni.fr/2012/09/10/l-argent-cache-d-ennahdha-tunisie/ http://owni.fr/2012/09/10/l-argent-cache-d-ennahdha-tunisie/#comments Mon, 10 Sep 2012 15:26:29 +0000 Guillaume Dasquié http://owni.fr/?p=119760

Le rapport de la Cour des comptes tunisienne sur les élections à l’Assemblée constituante renforce les soupçons quant à l’existence de financements occultes au profit du parti Ennahdha, sorti vainqueur de ce scrutin. Sur les 217 sièges à pourvoir, le mouvement islamiste en avait remporté 89 il y a près d’un an, le 24 octobre 2011.

Or, dans ce document de 168 pages, diffusé le 8 août dernier en langue arabe, les magistrats tunisiens livrent une analyse très critique des opérations financières qui ont pu mener à cette victoire.

Durant plusieurs mois, ils ont passé au crible les bilans comptables – quand ils les ont reçu – des 1 624 listes de candidats qui se sont présentées à travers tout le pays. D’abord dans le but de vérifier l’utilisation des 8,3 millions de dinars tunisiens (environ 4 millions d’euros) de financement public débloqués pour les différents partis, pour un pays comptant 7 millions d’électeurs.

Selon les éléments transmis par Ennahdha à la Cour, le parti aurait dépensé 400 000 dinars tunisiens (DT) pour ces élections, dont 171 000 DT au titre du financement public. Un montant qui ne semble pas convaincre plusieurs membres de la Cour, au regard du coût moyen de fonctionnement d’une liste. Tandis que 69 000 DT engagés par Ennahdha dans ces élections ont été justifiés par des factures non conformes.

En outre, onze listes Ennahdha en lice dans la trentaine de circonscriptions n’ont pas enregistré de dépenses liées à plusieurs manifestations publiques qui ont bel et bien été tenues. De même, huit listes Ennahdha ne présentent aucune dépense de transports, et dix-sept listes Ennahdha ne font figurer aucune dépense au titre de la communication électorale – laissant donc supposer que ces frais étaient supportés par d’autres structures.

Dans la même veine, la Cour note que les opérations au débit du compte bancaire d’Ennahdha ne comprenaient pas toutes les dépenses réalisées par le parti durant cette campagne. Autant de lacunes et d’incertitudes qui relancent les soupçons d’un financement en provenance d’hommes d’affaires et d’organisations islamistes basées dans le Golfe.

Au mois d’avril dernier, des Anonymous avaient révélé des milliers de mails des dirigeants d’Ennahdha, dont certains mettaient en évidence de curieuses discussions financières. À l’image de Kamel Ben Amara, élu d’Ennahdha, ancien membre de la Commission à l’énergie, qui semble disposer d’un compte ouvert dans une banque islamique du Qatar. Sur ces sujets cependant, les enquêteurs de la Cour se sont heurtés aux reliquats du système Ben Ali, qui ne fut pas vraiment conçu pour faciliter la transparence dans les choses de l’argent. Ils remarquent ainsi :

Les investigations sur le financement en provenance de l’étranger se caractérisaient par la longueur des procédures et la difficulté de suivre ces opérations puisque la douane se réfère au numéro de passeport pour suivre le bénéficiaire d’un mouvement financier en provenance de l’étranger, mais les banques utilisent le numéro de la carte d’identité nationale pour l’ouverture des comptes, empêchant ainsi un suivi automatique de telles opérations.
(Page 34)

Les Anonymous dévoilent Ennahdha

Les Anonymous dévoilent Ennahdha

En deux semaines, des Anonymous, avec lesquels OWNI s'est entretenu, ont installé sur des serveurs plus de 3 000 ...

L’hypothèse de financements étrangers venus remplir les caisses d’Ennahdha sort renforcée après cet examen par la Cour des comptes. Dans ce contexte, le 15 août dernier, l’Association tunisienne pour la transparence financière publiait un communiqué accusateur. Faisant en particulier référence à deux importants contrats confiés à des intérêts qataris ; l’exploitation de l’usine de phosphate de Sra-Ouertane, et la concession du marché de la raffinerie Skhira – confiée à Qatar Petroleum.

Ennahdha a répondu à ces diverses accusations lors de son dernier congrès. En promettant que ses ressources financières sont d’origine nationale. De manière plus détaillée, le parti a annoncé que durant la période de mars 2011 à juillet 2012, la totalité de ses ressources s’est élevée à 3,4 millions DT, pour 3,3 millions DT de dépenses.

Les autres formations politiques tunisiennes, dans leur apprentissage de la transparence, ne sont pas exemptes de reproches. Ainsi, Takatol, le parti du président de l’Assemblée constituante Mustapha Ben Jaâfar a effectué des versements en liquide de 21 000 DT ce qui est interdit par la loi. Takatol a aussi dépensé 55 000 DT sous forme de dons et de cadeaux soit 11% de la totalité de ses dépenses alors que la loi n’autorise que 5% (page 50 du rapport).

Dans la phase de transition démocratique qu’il a connu, le législateur n’a pas encore fixé de sanctions en cas de fraude ou d’irrégularité dans le financement d’une campagne électorale. En cas d’absence de dossier comptable, la sanction maximale pour un parti présent dans toutes les circonscriptions n’est que 5 000 DT.


Photo d’un graff de Banksy par ESSG (CC-byncsa) remixé par Ophelia Noor pour Owni ~~~~=:)

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Frédéric Lefebvre économiste américain http://owni.fr/2012/06/02/leconomie-americaine-de-frederic-lefebvre/ http://owni.fr/2012/06/02/leconomie-americaine-de-frederic-lefebvre/#comments Sat, 02 Jun 2012 09:41:36 +0000 Pierre Leibovici http://owni.fr/?p=112329

Portrait de Frédéric Lefebvvre à Bercy en janvier 2011 par © Jean-Michel Sicot/Fedephoto

Une campagne financée par le secteur privé. C’est celle de Frédéric Lefebvre – qui n’a pas été en mesure de répondre à nos questions. L’ancien secrétaire d’État est candidat de l’UMP pour les législatives en Amérique du Nord. Pour cette élection inédite – pour la première fois les Français résidant à l’étranger élisent leurs députés – ce proche de Nicolas Sarkozy a joué avec le feu en matière de comptabilité. Il risque aujourd’hui de voir son compte de campagne contesté.

Au cours de ses deux mois de campagne, Frédéric Lefebvre n’aura pas tenu beaucoup de meetings ouverts au public. Chacune de ses réunions réclamait un carton d’invitation. Confronté à de multiples dissidences et à de vives critiques au sein même de l’UMP d’Amérique du Nord, le candidat a peut-être voulu éviter les débordements comme celui qui l’a poussé à exclure une militante, lors du lancement de sa campagne à Boston. Selon les informations que nous avons recueillies, le ténor de l’UMP a choisi de dépenser le moins possible pour sa campagne, en faisant appel, notamment, à la générosité des entreprises. Une pratique en principe illégale.

Encans

Lundi 2 avril, rue du Couvent à Montréal. Quelques dizaines de militants UMP se réunissent à l’Hôtel des Encans, une ancienne église reconvertie en une somptueuse salle de vente aux enchères. Ils sont venus assister au lancement de la campagne de l’unique candidat investi par l’UMP pour cette circonscription des Français de l’étranger, Frédéric Lefebvre.

L’ancienne église appartient au richissime commissaire-priseur Iegor de Saint-Hippolyte, également gérant de la société Iegor Auctions. L’homme est un proche de la section UMP du Québec – à laquelle il avait offert l’hospitalité pour une réunion, en février 2011 – et de quelques-uns de ses membres éminents. Le premier s’appelle Thibault Duval, président des Jeunes Populaires du Québec – la section 16-30 ans de l’UMP – également l’un des employés de Iegor Auctions, où il officie en tant que directeur du département “Art asiatique”.

L’autre figure locale de l’UMP proche de Iegor de Saint-Hippolyte n’est autre que Jeanine de Feydeau, la directrice de campagne de Frédéric Lefebvre pour le Canada. Elle est justement l’organisatrice de la soirée du 2 avril.

Contactée par Owni sur ces divers liens, Jeanine de Feydeau a préféré laisser répondre le directeur adjoint de la campagne au Canada, Stéphane Minson. Lequel nous a expliqué, lors d’un entretien téléphonique d’une vingtaine de minutes, comment Iegor Auctions avait offert son hospitalité à l’occasion du “meeting des Encans” :

Je peux vous garantir que la salle a été fournie à titre personnel et gratuit. Elle n’a coûté absolument rien au candidat.

De bonnes intentions qui pourraient entrer en contradiction avec les textes. Selon l’article L52-8 du Code électoral, la fourniture de services par une société comme le prêt d’une salle de meeting est prohibée :

Les personnes morales [terme juridique pour qualifier les sociétés, NDLR] (…) ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d’un candidat ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués.

Relais

Avec une petite subtilité, néanmoins. En effet, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), l’organisme chargé de vérifier les dépenses de campagne des candidats, accorde une qualification “électorale” aux réunions de militants où figure un “relais d’opinion”, comme l’indique son site Internet. Si aucun relais d’opinion ne se présente, les dépenses effectuées lors d’une réunion de militants ne doivent pas, dès lors, figurer au compte de campagne du candidat.

Mais pour le “meeting des Encans”, le journaliste du bureau de Montréal de l’Agence France presse (AFP) a confirmé sa présence à Owni. La réunion revêt donc un caractère électoral, et la non-retranscription dans le compte de campagne des frais de location de la salle des Encans devrait entraîner une contestation. Le carton d’invitation évoque une réunion entre amis. Mais quand il parle du “meeting des Encans” sur son blog de campagne, dans un billet du 13 mai dernier, Frédéric Lefebvre la qualifie lui-même de réunion publique :

De la même façon, lors de ma grande réunion publique au magnifique Hôtel des Encans il y a quelques mois, avec tant de compatriotes et tant de jeunes autour de Thibault Duval. Quelle émotion dans cette salle mythique.

Tontons Flingueurs

Des réunions sur invitation comme celle de l’Hôtel des Encans, Frédéric Lefebvre en a tenu plusieurs. L’entretien avec le directeur adjoint de sa campagne pour le Canada, Stéphane Minson, en a révélé d’autres :

Notre objectif est de faire ce qu’on pourrait appeler de la ‘politique non-spectacle”. On ne se retrouve qu’entre amis. Chacun paie sa part et a plaisir à le faire. Ce qu’on souhaite, c’est obtenir un budget égal à zéro : zéro dépenses.

Encore une fois, l’absence de mention de ces dépenses sur le compte de campagne n’est contraire à la loi que si un relais d’opinion est présent parmi les militants. Owni a retrouvé la trace d’au moins deux réunions sur invitation qui se sont tenues dans des restaurants montréalais et en présence de la presse québécoise.

Le premier de ces meetings privés a lieu le 2 avril dernier, le même jour que celui de l’Hôtel des Encans, un peu plus tôt dans la journée. Une douzaine de militants UMP sont alors conviés à un repas dans la crêperie Les Tontons Flingueurs (ça ne s’invente pas), aux côtés du journaliste de Radio-Canada Franck Desoer, qui les interroge pour un reportage consacré, entre autres, aux élections législatives au Québec.

Mais ce jour-là, c’est le gérant des Tontons Flingueurs qui paie son repas ou plutôt, selon le droit électoral, la personne morale du restaurant. Comme pour Iegor Auctions, cette aide en nature est à même d’être déclarée illégale par la Commission nationale des comptes de campagne. Interrogée par Owni, l’une de ses porte-parole confirme, tout en précisant qu’il ne s’agit pas d’une “décision” mais d’une “réponse a priori, que cette invitation peut être considérée comme le “concours d’une personne morale à la campagne d’un candidat”.

Parce qu’il n’y a pas de petits profits, chacun des militants est également sommé de payer sa part ce midi du 2 avril. Pour cela, cependant, “rien ne devrait être considéré comme illégal”, selon l’interlocutrice de la Commission nationale des comptes de campagne que nous avons jointe.

Très récemment, cette situation s’est répétée à l’identique dans un autre restaurant de Montréal. Le 23 mai dernier, un dîner militant est organisé au Plein-Sud, toujours en présence de la presse, comme le confirment deux images présentes sur la page Facebook officielle de Frédéric Lefebvre – la première représente une interview avec la télévision de Radio-Canada tandis que deux caméras de télévision sont visibles sur la seconde.

Le carton d’invitation pour cette soirée obtenu par Owni annonce encore une fois la couleur, en indiquant aux militants que le menu “entrée, plat, dessert” leur en coûtera 30 dollars :

Recadrage

Les mêmes doutes que précédemment subsistent. Frédéric Lefebvre a jusqu’au 14 septembre prochain – voire jusqu’au 28 septembre s’il passe le premier tour – pour déposer son compte de campagne définitif auprès de la Commission qui devra l’examiner. Il lui reste donc plus de trois mois pour demander à ces généreuses entreprises de produire les factures qu’elles ont réglées à sa place et qui manquent à son relevé de dépenses.

S’il y parvient, le ténor de l’UMP n’aura donc sans doute rien à craindre de la loi. Un recadrage de ses proches s’imposera sûrement, en revanche. Toujours convaincu de la légalité de sa démarche, Stéphane Minson termine son entretien sur ces mots :

Vous savez, c’est pas facile de trouver une salle gratuite à Montréal. Je garde la surprise, mais pour un autre grand déplacement lors du deuxième tour, on s’est arrangé pour ça ne coûte rien au candidat.


Photographie de Jean-Michel Sicot ©/Fedephoto. Portrait de Frédéric Lefebvre à Bercy en janvier 2011 pour les voeux à la presse. Edition par Ophelia Noor pour Owni /-)

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La proportionnelle pour le fric des partis http://owni.fr/2012/01/23/bataille-autour-du-fric-de-la-presidentielle/ http://owni.fr/2012/01/23/bataille-autour-du-fric-de-la-presidentielle/#comments Mon, 23 Jan 2012 08:51:09 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=94911

La loi organique adoptée le 12 janvier dernier par le Sénat était porteuse d’une petite révolution pour les finances des partis. La loi sur les dépenses de campagne de l’élection présidentielle, modifiée par les sénateurs, proposait de ne plus tenir compte du seuil des 5% de voix au premier tour. Mais de se fonder sur le nombre de suffrages exprimés.

Le texte initial, présenté par François Fillon dans le cadre du plan de rigueur, avait pour vocation unique de raboter les sommes remboursées aux candidats à la présidentielle. Le Sénat y avait incorporé cette petite subtilité, prévoyant que l’une des principales sources de remboursement de leurs frais de campagne serait:

répartie proportionnellement au nombre de suffrages obtenus au premier tour de l’élection présidentielle par chacun d’entre eux.

Jusqu’ici, la loi remboursait les candidats en fonction de seuils auxquels correspondaient des montants forfaitaires. En 2007, les remboursements étaient de 808.000 euros pour ceux n’ayant pas atteint 5% des suffrages exprimés. 8,1 millions pour ceux ayant dépassé ce seuil de 5%. Et 10,8 millions pour ceux arrivés au second tour.

Interrogé par OWNI, le sénateur PS Gaëtan Gorce, auteur de l’amendement qui bouleverse ce système, a estimé que le plan d’économies de François Fillon ne présentait pas de garanties suffisantes :

Si plus de trois candidats dépassent les 5%, le projet de M. Fillon ne peut pas garantir d’économie, laquelle est de toute façon modeste (3 à 5 millions d’euros). J’ai donc décidé de prendre le gouvernement à ses propres mots : au lieu de dépendre du nombre de candidats, le remboursement va dépendre du nombre de suffrages exprimés. En divisant le budget total par le nombre de voix, vous obtenez un quotient qu’il suffit de multiplier par le nombre de vote obtenu par chacun. Pour les deux finalistes, il y a une prime de deux millions, un peu comme aujourd’hui.

Adopté au Sénat, cet amendement ainsi que d’autres dispositions ont été balayés à l’Assemblée nationale suite à une Commission mixte paritaire qui a conclu au désaccord entre les deux chambres. Mais “Nous représenterons les amendements”, assure Gaëtan Gorce, chargé au Sénat de suivre le volet des dépenses de campagne.

Fillon épargne les partis

Fillon épargne les partis

Annoncées le 7 novembre par François Fillon, les mesures du plan de rigueur sur les partis écornent les aides publiques ...

La mort des petits candidats

Pour le sénateur de la Nièvre, cette mesure est “plus juste” pour les candidats du fait de la disparition d’un effet de seuil, à savoir la course aux 5% qui peut décider de la vie ou de la mort d’un parti ayant engagé de lourds frais dans une campagne et qui loupe le remboursement de quelques milliers de voix.

La mesure suscite néanmoins une certaine inquiétude. Député vert auteur d’une loi sur la transparence du financement des partis politiques, François de Rugy y voit un risque de renforcement du bipartisme :

Le principe est contraire à l’égalité entre les candidats, le Conseil constitutionnel a de grandes chances de retoquer un tel texte. Par ailleurs, les “candidats moyens” comme François Bayrou, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen ou, dans une moindre mesure, les écologistes vont se sentir lésés. Le dispositif, en revanche, avantagerait nettement les deux gros partis, comme c’était déjà le cas pour le rabot proposé par Fillon qui ne portait pas sur la limite de dépense, la seule que prennent vraiment en compte UMP et PS, car ils en ont les moyens.

Gaëtan Gorce assure que le résultat en reviendrait au même pour les grands partis. “Peut-être faudrait-il prévoir un forfait pour éviter que ceux qui obtiennent moins de 500000 voix ne se retrouvent en difficulté”, concède-t-il.

Affrontement entre les deux hémicycles

La confrontation sur le texte ne cristallise pas que l’opposition des conceptions sur les finances de campagne. La gauche sénatoriale et les députés de droite jouent également des coudes sur la question des dépenses du Président-candidat. Au sein du même article III, les socialistes ont ainsi inséré deux mentions visant directement Nicolas Sarkozy :

- une première obligeant à inscrire au compte de campagne les dépenses engagées ou effectuées “à son profit, dès lors qu’elles ne sont pas dénuées de lien avec le débat politique national.”
- une seconde permettant au Conseil constitutionnel de renvoyer devant le Parlement des comptes non validés afin de juger si les manquements renvoient “à des actes constituant un manquement manifestement incompatible avec l’exercice du mandat de Président de la République”.

Des dispositions qui visent explicitement les déplacements très politiques du chef de l’État. Ces dispositions reviendront une fois la loi organique repassée entre les mains du Sénat. “Il s’agit d’une mise en garde, insiste Gaëtan Gorce. Nous allons faire la démonstration que le gouvernement ne souhaite pas éclaircir les comptes de campagne.” Une lutte parallèle à celle engagée par François Hollande contre Nicolas Sarkozy sur la question de la rigueur, où les deux principaux candidats ont un peu à perdre Mais moins que les petits. Quand les gros maigrissent, les maigres meurent.

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Eva Joly en low cost http://owni.fr/2011/12/06/eva-joly-bat-la-campagne-en-low-cost/ http://owni.fr/2011/12/06/eva-joly-bat-la-campagne-en-low-cost/#comments Tue, 06 Dec 2011 11:13:29 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=89422

Pas de garantie financière suffisante. L’équipe d’Eva Joly devra se contenter d’une petite campagne à deux millions d’euros. Sans certitude que la candidate d’Europe Ecologie-Les Verts atteigne les 5% qui garantiraient un remboursement à concurrence de 8 millions d’euros, les banques ont pour l’instant débloqué la ligne de crédit minimum : 840 000 euros, accordés par le Crédit coopératif. Soit le plancher de frais pris en charge pour les candidats recueillant les 500 parrainages nécessaires pour valider la candidature. Un premier apport auquel devrait s’ajouter, selon Yves Contassot, trésorier de la campagne, d’autres fonds :

Nous sommes en pleine négociation pour un deuxième prêt dont l’obtention est quasi actée, ce qui devrait nous permettre de porter le budget total entre deux et deux millions et demi d’euros. Pour aller plus loin, il faudra obtenir des garanties, par exemple en ayant recours à une assurance qui compenserait le manque à gagner si nous n’atteignons pas le seuil des 5%.

À deux millions, la campagne d’Eva Joly se déroulerait donc avec la moitié du budget utilisé par les Verts il y a dix ans. C’est-à-dire celui de Noël Mamère, qui dépensa 4 millions pour porter la candidature des Verts en 2002, et dont le score dépassa de quelques dixièmes le seuil permettant un remboursement.

Sans château ni baronnies

Or, à l’époque, le parti était unifié. Mais de nos jours, la formation d’Europe écologie-Les Verts est une situation paradoxale. Malgré deux fortes poussées électorales, à la chambre de Strasbourg et aux régionales, le parti n’a pas augmenté son nombre d’élus au Parlement (en dehors d’Anny Poursinoff, élue 4è député verte lors d’une législative partielle dans les Yvelines). Hélas, aux yeux des banques, députés et sénateurs constituent des gages financiers stables, puisqu’ils versent chaque année à leur parti une part significative de leur indemnité parlementaire. Des ressources auxquelles EELV ne peut prétendre.

Et impossible d’hypothéquer “La Chocolaterie”, siège parisien des Verts à côté de la gare du Nord. La candidate empruntant en son nom, elle ne peut adosser ses demandes de crédit sur des biens fonciers ne lui appartenant pas. La formation politique des Verts, en son nom, a donc accepté de garantir une partie du crédit. Pour le reste du budget, l’équipe se repose sur les négociations avec les banquiers menées par le trésorier Yves Contassot, et sur les contributions militantes, organisées par Julien Bayou.

Abaisser le seuil psychologique du don

L’idée de tendre le chapeau aux militants n’est pas nouvelle chez EELV : dès les premières universités d’été à Nîmes en août 2009, Daniel Cohn-Bendit avait lancé l’idée, qui n’avait guère trouvé de lendemain, pour donner une autonomie financière à la nouvelle formation. Sans illusion sur le poids des dons de personnes physiques dans la campagne, Julien Bayou voit néanmoins plusieurs intérêts à ce mode de financement :

Pour commencer, c’est de l’argent frais que nous n’avons pas à assurer ou à gager. Ensuite, c’est une forme de mobilisation alternative : les gens qui ne peuvent pas nous aider de leur temps nous font un chèque ou font un virement sur le site Internet. Nous sommes actuellement entre 1 000 et 1 500 euros par jour, toutes contributions confondues, pour un total avoisinant les 50 à 60 000 euros depuis un mois et demi. A ce rythme, nous aurons atteint les 80 000 euros de dons de personne physique qu’avait réuni Dominique Voynet en 2007 avant Noël. Mais, même si nous maintenons ce rythme, avec 200 000 euros de collecte total, ça ne représentera pas plus de 10% du budget. Il s’agit surtout de faire passer le mot et de diffuser un message.

Nous avons contacté un responsable de la collecte au sein d’une ONG très en vue sur les questions environnementales. Selon lui, l’objectif de 1 000 euros par jour, de manière régulière, semble très ambitieux. L’équipe de campagne, consciente de ces limites, mise sur une augmentation du nombre de contributeurs mais une baisse des contributions. Pour stimuler son électorat, le directeur de la mobilisation organise des opérations thématiques :

Mettre en face d’une contribution financière le nombre de tracts que ça va nous permette d’imprimer ou de stickers que nous allons pouvoir sortir rend les petits versements moins dérisoires.

Récemment, l’équipe a lancé une opération de partage des frais pour le clip de campagne, dont le monteur a pu être payé par les versements d’une centaine de personnes. Pour l’anniversaire de la candidate, le 5 décembre, un mail est parvenu aux abonnés des mailing lists d’Europe écologie proposant une participation exceptionnelle de “5 euros pour le 5 décembre” (en tenant compte des 66% d’abattement fiscal, autrement dit, un don direct à l’association de financement de 15 euros). Une idée montée en petit comité, autour de Frédéric Neau, l’animateur des Ecologeeks, à la technique, Elliott Lepers au design, Julien Bayou et Elise Aubry, à la diffusion sur les réseaux sociaux et militants – ex agitateurs des collectifs Jeudi Noir, Génération précaire et Sauvons les Riches.

Sobriété forcée

Une petite équipe mais qui représente la moitié des permanents des troupes jolyistes. Adaptée au budget, la voilure du navire présidentiel écolo se réduit à huit permanents réunis dans le QG parisien de La Ruche. Un choix forcé mais assumé par le trésorier de la campagne comme un véritable parti pris politique :

Le scandale, c’est la dilapidation des fonds publiques par les autres partis : le financement des campagnes se fait avec nos impôts.

Une sobriété qui ne rassure cependant pas tout le monde. Anciens Verts comme néo-Europe écolos, nombreux sont ceux qui voient avec pragmatisme l’impact arithmétique des dépenses sur les scores. Quant au financement militant, il agace certains anciens de la campagne de Mamère qui y décèlent un romantisme qui sied peu à la course à l’Élysée :

1 000 euros par jour, il n’y pas de quoi se vanter : un budget de campagne, ça ne se chiffre pas en milliers d’euros.

Côté trésorerie, l’idée de la sobriété est défendue mais Yves Contassot ne refuse aucune adaptation aux heureux hasards de la campagne :

Le budget est séquentiel et évolutif : nous ne fixerons pas de limite jusqu’au dernier moment. Si les sondages portent Eva Joly et permettent de lever un surplus pour renforcer notre présence dans la dernière ligne droite, nous ne nous en priverons pas.

Image Marion Boucharlat pour OWNI

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Le porte-monnaie de Marine Le Pen http://owni.fr/2011/11/25/marine-le-pen-microparti-front-national/ http://owni.fr/2011/11/25/marine-le-pen-microparti-front-national/#comments Fri, 25 Nov 2011 17:40:39 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=88352

En route pour 2012, Marine Le Pen a créé il y a bientôt un an son propre microparti. Il s’appelle “Jeanne”. Ses fondateurs l’ont déclaré à la préfecture de police de Paris le 18 janvier dernier. Ses statuts ont été reconnus dans la foulée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, ouvrant la voie à des prêts et dons de personnes physiques.

Au gouvernail de cette formation, un équipage de proches de Marine Le Pen : aux postes de président et trésorier, deux amis d’étude d’Assas de la candidate, Florence Lagarde et Olivier Duguet, tandis que le mandataire financier est Steeve Briois, secrétaire général du FN et candidat à Hénin-Beaumont avec la chef du parti. Contacté par OWNI, il nous a expliqué la raison de la création du microparti :

Jeanne a réuni des fonds, notamment des prêts bancaires, à l’époque où le Front national ne pouvait pas le faire à cause des conflits financiers avec Fernand Le Rachinel.

En grandes difficultés financières et loin d’être encore renfloué par la vente de son ancien siège (le fameux Paquebot de Saint-Cloud), le Front national croulait alors sous les emprunts contractés auprès de l’affichiste historique de Jean-Marie Le Pen. Conséquence de quoi, les fonds levés ponctuellement auprès des banques s’évaporaient la plupart du temps sur les dettes électorales encore chaudes.

Aide financière aux candidats

Le père de Marine Le Pen lui-même avait eu recours au même mécanisme : malgré son nom un peu défraîchi de “Cotelec”, le microparti du président d’honneur du FN affichait en 2008 235 481 euros de “dons de personnes physiques” et un excédent budgétaire de plus de 175 000 euros (malgré plus de deux millions d’emprunt courant).

Extrait de la publication générale des comptes des partis et groupements politiques au titre de l’exercice 2008.

En dehors d’offrir un autre nom aux banques pour contracter des emprunts (là où le FN était empêché du fait de ses dettes), les micropartis offrent l’avantage de contourner la limitation de dons aux formations politiques. Plafonnés à 7 500 euros par personne, par parti et par an, les “dons de personnes physiques” peuvent se multiplier avec les formations périphériques et “clubs”. Une fois abondés, ces derniers prennent en charge une partie des dépenses de campagne du candidat ou reversent l’argent au titre de “l’aide financière à d’autres formations politiques”, augmentant ainsi les sources de financement. Steeve Briois nous a confirmé avoir reçu des dons de personnes physiques sans en préciser le montant, indiquant seulement avoir pour l’instant principalement levé de l’argent par emprunt. Sur l’avenir de “Jeanne”, il ajoute :

Jeanne est une structure politique qui a vocation à participer au débat public, puisqu’elle est reconnue comme parti. Nous verrons si elle joue ou non un rôle dans la campagne, nous en discuterons dans les semaines à venir.

Pour l’instant, le microparti de Marine Le Pen a dépensé ses premiers deniers à l’occasion des élections cantonales de 2011, une aide qu’avait déjà évoqué un confrère de l’Express dans un livre consacré à la nouvelle présidente du FN. Le mandataire financier confirme avoir soutenu les candidats estampillés FN par des prêts, “comme le fait le parti à chaque élection”. Selon Patrick Bassot, élu conseiller général du Vaucluse sous cette étiquette dans le canton Carpentras Nord, “Jeanne” a également fourni du matériel de campagne clef en main :

Pour la campagne des élections cantonales, des tracts reprenant l’argumentaire national de Marine Le Pen, que j’ai validé, nous ont été fournis par l’équipe de M. Briois. J’ai fait une campagne sur mes propres fonds a minima, quelque chose comme 5 000 euros. Je n’ai pas reçu de prêt mais le Front national m’a apporté son aide par le biais de ce matériel reprenant les thèmes de campagne de la candidate.

Interrogé à ce sujet, Steeve Briois confirme avoir réalisé des “tracts personnalisés de quatre pages, cartes postales, etc.” mais en aucun cas à titre gracieux, uniquement à l’occasion de prêts aux candidats.


Illustration : Marion Boucharlat pour OWNI.fr.


Retrouvez les autres articles de ce dossier :
Le FN sauvé par France télé.
Les familles d’extrême droite sur Internet.

Image de une : Marie Crochemore pour OWNI.fr.

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Le Front de gauche à la page recette http://owni.fr/2011/11/16/le-front-de-gauche-a-la-page-recette/ http://owni.fr/2011/11/16/le-front-de-gauche-a-la-page-recette/#comments Wed, 16 Nov 2011 07:22:23 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=87116 Avec plus de 200 000 exemplaires distribués depuis sa sortie le 17 septembre, le programme du Front de Gauche a rapporté moins de 30 000 euros au budget de campagne de Jean-Luc Mélenchon mais permis une diffusion inespérée du texte pour un coût nul.

50 000 euros d’économie

« 200 000 exemplaires, c’est un petit prix littéraire, un Renaudeau ou un Médicis, s’amuse François Delapierre, directeur de la campagne. Pour faire un Goncourt, il faudra atteindre le demi-million. » A titre de comparaison, l’éditeur du livre de François Hollande, Privat, n’a écoulé que 10 000 exemplaires depuis le 25 août.

A la différence du candidat socialiste qui aurait (selon son éditeur) renoncé à ses droits, Jean-Luc Mélenchon a obtenu 6% sur les ventes de son opus collectif pour le budget de campagne. Soit, à ce jour, une maigre contribution de 24 000 euros au budget de campagne. A terme, l’équipe espère écouler autour de 350 000 exemplaires, sans compter un projet d’édition en BD du programme prévue pour janvier. Même si, pour le directeur de campagne du Front de Gauche, l’objectif a déjà été atteint :

Nous pensons gagner au maximum 50 000 euros avec ce livre ce qui est une paille, l’équivalent de la collecte sur un petit meeting. L’important n’est pas que ça nous rapporte de l’argent, l’important est que ça nous a permis d’économiser la diffusion d’un tract quadrichromie à plusieurs millions d’exemplaires, ce qui nous aurait coûté à peu près autant. Sans compter que nous n’aurions jamais pu atteindre autant de personnes avec un programme de 16 pages envoyé par la poste.

Au départ, le livre avait pour destination le colis de « matériel de rentrée » de la Fête de l’Humanité, ne promettant qu’une diffusion « par capilarité », de proche en proche, au sein des milieux sympathisants. Avec Librio pour éditeur (collection de J’ai Lu, du groupe Gallimard) et un prix de 2 euros, le programme a gagné les rayons de Fnac (où il s’aligne dans le top 10 des ventes) et même des supermarchés.

« Au début, certaines grandes surfaces refusaient de mettre le programme en rayon », glisse François Delapierre. Contacté par OWNI, l’éditeur n’a pas donné suite à nos questions. Depuis sa sortie, le bouquin a connu deux retirages pour la mise en place en librairie et quatre pour les ventes militantes.

Pour l’éditeur aussi, l’opération est une réussite : dans ses livres de rentrée, Gallimard classe le texte collectif du Front de Gauche aux côtés du livre sur la Démondialisation d’Arnaud Montebourg. Le dernier succès d’édition d’un programme politique en librairie, de mémoire de permanent du siège du parti aux Lilas, « c’était le programme commun du PC et du PS en 1972 ».


Illustrations et photos par Micn2Sugar [cc-by-nd]
Captures d’écrans, couvertures des livres, Le programme du front de gauche édité chez Librio et Le programme commun du parti communiste et socialiste

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Fillon épargne les partis http://owni.fr/2011/11/11/fillon-partis-financement-politique/ http://owni.fr/2011/11/11/fillon-partis-financement-politique/#comments Fri, 11 Nov 2011 07:30:33 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=86620 Présentées par le Premier ministre comme des mesures « d’exemplarité et de transparence » au sein du plan de rigueur, les réductions du budget évitent soigneusement une niche fiscale évaluée à 40 millions d’euros. Il s’agit de l’exonération de 66% des dons et adhésions aux partis politiques (à concurrence de 20% du revenu imposable) qui se trouve par ailleurs avoir été en 2007 l’une des principales sources de financement de la campagne de Nicolas Sarkozy. Le candidat de l’UMP avait bénéficié de 7 millions d’euros de dons de personnes physiques sur 20 millions d’euros de budget, contre 100 000 euros pour son adversaire du second tour, Ségolène Royal.

40 millions d’euros de niche maintenus

Détaillées dans le dossier de presse du « plan d’équilibre des finances publiques », les mesures « d’exemplarité et de transparence » proposées se divisent en deux réductions :

  • réduction de 5% du plafond des dépenses de campagne remboursables;
  • réduction de 5% des aides publiques aux partis politiques.


Dans le premier cas, il s’agit de la somme remboursée aux candidats selon leur score au premier tour d’une élection. Soit, pour la présidentielle :

  • 808 000 euros pour les candidats ayant obtenu moins de 5% de suffrages exprimés ;
  • 8,08 millions d’euros pour ceux ayant obtenu plus de 5% ;
  • 10,79 millions d’euros pour les candidats sélectionnés pour le second tour.

Le deuxième budget concerne les aides publiques obtenues en fonction des scores aux élections législatives : une enveloppe de 80 millions d’euros annuels répartis en deux tranches, une indexée sur le nombre de voix (moins d’éventuelles pénalités en cas de non respect de la parité) et une en fonction du nombre de parlementaires (sénateurs et députés) rattachés au parti.

En coupant 5% sur les remboursements, Matignon estime économiser 5 millions d’euros, tandis que les 5% de baisse des aides publiques représenteront 4 millions d’euros de dépense en moins. Au total, le Premier ministre a donc appelé de ses vœux 9 millions d’euros de « rigueur » pour les partis. Soit moins d’un quart de la niche fiscale sur les dons et adhésions estimée par le président de la Commission nationale des comptes de campagne et financements publics. Or, contrairement à ce que pourrait laisser croire le futur utilisé par la plupart des médias, les deux mesures ne sont pas encore adoptées. Heureusement, le gouvernement a à sa disposition deux outils qui lui permettront de faire passer le tout sans anicroche.

La rigueur pour les remboursements

Pour la modification des plafonds de remboursement des dépenses de campagne, une signature de Claude Guéant suffira à valider le décret qui les détermine. Pour les financements publiques, en revanche, il faut passer par une loi et donc trouver un moyen d’amener le texte aux deux chambres « avant la fin de l’année », selon les voeux de François Fillon. Or, coup de chance, lundi 14 décembre passe la « voiture balaie » de la loi de finance : l’analyse des « articles non rattachés », fourre-tout de la dernière chance pour les mesures budgétaires. Une séance de l’Assemblée où le gouvernement peut déposer des amendements jusqu’à la dernière minute, avec un minimum de débat en face et des sous amendements qui ne peuvent être déposés qu’à haute voix par l’opposition… Autrement dit : un boulevard pour faire adopter le texte.

Coauteur d’une proposition de loi débattue mi-décembre sur la transparence du financement des partis politiques, l’écologiste François de Rugy pointe un autre élément qui entache de favoritisme ce volet du plan de rigueur :

La mesure proposée par François Fillon n’est pas très correcte : il ne propose de ne toucher qu’au plafond de remboursement des frais et pas au plafond de dépense. Les partis qui bénéficient le plus des dons, notamment l’UMP, ne sont que peu impactés par la réduction du plafond remboursable. Leur seul limite, c’est le plafond de dépense légal, qu’ils ne doivent pas dépassé et qui, lui, est resté inchangé.

Rien non plus pour réduire le plafond des dons au parti, fixé à 7500 euros par personne et par parti, micro-partis compris. Seule conséquence néfaste pour l’UMP selon le trésorier du Parti socialiste : « la réduction de l’aide publique aux partis touche la majorité au premier chef, puisqu’ils ont le plus grand nombre d’élus et qu’ils ont obtenus le plus de voix aux législatives, note Régis Juanico. A moins que le vote de 2012 ne donne lieu à un retournement de tendance… » D’ici là, le gros du budget de campagne est sauf.


Photos via Flickr par Steve Snodgrass [cc-by] et Andres Rueda [cc-by]

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Le FN sauvé par France Télé http://owni.fr/2011/11/09/arlette-chabot-fn-marine-le-pen/ http://owni.fr/2011/11/09/arlette-chabot-fn-marine-le-pen/#comments Wed, 09 Nov 2011 07:44:31 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=86265 Selon des témoignages concordants recueillis par OWNI, la fameuse émission d’Arlette Chabot du 9 décembre 2010 avec Marine Le Pen en plateau a eu un effet majeur peu prévisible. Ce débat télévisé a sauvé les finances du Front National à un moment clé, à l’insu, naturellement, de la présentatrice et de la chaîne.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Début décembre 2010, en pleine crise pécuniaire, le Front national avait besoin d’un miracle pour financer la suite de ses activités. Et c’est par la lucarne que le salut est venu. Après une invitation de Marine Le Pen à l’émission de France 2 « À vous de juger », le parti a trouvé un ballon d’oxygène financier de plus de 350 000€ à même de lui offrir quelques mois de répit, et surtout de permettre la tenue de son XIVe Congrès à Tours. Au siège de Nanterre, un cadre du parti avec lequel nous nous sommes entretenu en rit encore.

Le Téléthon du Front

Au moment où l’équipe de l’émission contacte Marine Le Pen, le Front National est à la veille d’échéances cruciales. Les adhésions sont sur le point d’être clôturées pour élire le nouveau président et le comité central. Mais les caisses sont à marées basses. Trésorier du FN, Wallerand de Saint Just n’a guère de marge de manœuvre ; l’ancien siège de Saint Cloud n’est pas encore vendu et les subventions publiques indexées sur les résultats piteux des législatives de 2007 ont terriblement chuté. Rencontré dans le cadre de ce reportage, il nous confie :

Fin novembre 2010, nous avions payé l’acompte pour la location du Palais des Congrès de Tours à Vinci et pour le traiteur pour les deux jours. Le deuxième acompte arrivait et nous étions à sec, impossible de payer, sans parler de la facture globale de 200 000€… Début décembre, je réfléchissais à la manière d’annoncer à Marine Le Pen et à Bruno Gollnisch que le Congrès devrait se tenir à Nanterre, faute de fonds.

La diffusion en direct de « À vous de juger » est fixée au 9 décembre 2010. Elle se déroule donc 24 heures avant la clôture des adhésions et des mises à jour de cotisation ouvrant droit au vote pour l’élection du nouveau président du parti lors du congrès. Pour répondre aux retardataires, le service des adhérents du FN met en place une équipe d’une quinzaine de permanents et militants le jeudi jusqu’à minuit, dernier carat.

Veste bleue nuit, haut bleu clair, Marine Le Pen débute l’émission seule face à Arlette Chabot, entourée d’un petit public mais surtout regardée par plusieurs millions de Français. Selon Médiamétrie, 3,356 millions de téléspectateurs ont leur poste réglé sur France 2 à 20h35. Le record d’audimat pour l’émission depuis janvier 2010 jusqu’à sa déprogrammation en avril 2011. Et c’est devant ces 14,6% de part d’audience que la vice-présidente du FN y va d’un petit coup de pub décisif, après une petite demi-heure d’émission (voir la vidéo ci-dessous à 6 minutes 24 secondes):

J’en appelle à tous ceux qui pensent que peut-être dans 30 ans, ils regretteront de ne pas s’être engagé auprès de ceux qui défendent leurs idées. Je leur dis : venez nous rejoindre, y’a qu’un clic à faire, vous venez sur le site Front national.com et vous nous rejoignez. Et en plus il vous reste 24 heures si vous voulez participez à l’élection du président ou de la future présidente du Front national.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

En quelques instants, à Nanterre, la cellule des adhésions de la dernière heure est submergée par les demandes téléphoniques et Internet. A l’écran, contente de son coup, relevé par l’animatrice de France 2, la future présidente du FN sourit déjà.

Bienfaiteurs

Elle enregistre plus de 1 000 adhésions par heure, pour 90 euros de dons ou de droits d’adhésion en moyenne. Responsable des adhésions au Front national, Sandrine Leroy déclare presser 600 à 800 cartes par semaine, 1500 cartes en périodes fastes. Selon elle, ce jeudi 9 décembre au soir, le coup de pub de Marine Le Pen fait exploser les stats :

Dans la soirée, nous avons enregistré plus de 4000 adhésions avec tous les profils : des adhésions jeunes à 15 euros jusqu’à des bienfaiteurs à 250 euros. La cotisation moyenne était de 90 euros avec 70% de nouveaux adhérents.

Ce seul passage télé a été plus efficace que le matraquage habituel des relances aux anciens militants et adhérents n’étant pas à jour de leur cotisation. Dans le fichier définitif certifié par huissier, 22 362 noms apparaissent, prêts à recevoir le matériel électoral : près de 20% des votants du Congrès ont renouvelé ou demandé leur bulletin d’adhésion dans la nuit du 9 au 10 décembre.

Près d’un an plus tard, à la date du 4 novembre dernier, le Front national revendique 44 000 adhérents. Une croissance largement portée par la présence médiatique de Marine Le Pen. La seconde vague d’adhésions massive suit le jour de son élection au poste de présidente du parti, le 15 janvier. La troisième déferle début mars, après le sondage Harris Interactive pour Le Parisien qui la place avant Nicolas Sarkozy au premier tour.

« Nous avons doublé les revenus mensuels liés aux adhésions sur mars », précise Sandrine Leroy. À raison de 110 000 euros de rentrées par mois par ce seul moyen, le Front national vit littéralement des nouveaux venus et compte bien renouveler les fonds avec les mises à jour de cotisation. Une évolution qui réjouit Wallerand de Saint Just :

Les cotisations sont un gage d’indépendance : c’est du bon argent politiquement. Tant qu’il rentre, c’est que ça marche.

Contactée dans le cadre de ce reportage, la rédaction de l’émission de France 2 n’a pas donné suite à nos demandes.


Photos via Flickr, A.Curral cc-by-sa

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La prime de la primaire http://owni.fr/2011/10/16/la-prime-de-la-primaire/ http://owni.fr/2011/10/16/la-prime-de-la-primaire/#comments Sun, 16 Oct 2011 22:53:19 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=83597

L’affluence aux urnes pour le second tour de cette primaire permettra au Parti socialiste et à François Hollande de se lancer dans la campagne présidentielle avec une belle avance financière. Avec un pactole d’au moins 1,2 million d’euros. Selon les trésoriers du parti avec lesquels nous nous sommes entretenus, les frais engendrés par cette élection, d’un montant de 3,6 millions d’euros, ont été largement couverts dès le premier tour grâce au système de participation de « un euro ou plus » par votant.

L’argent collecté, premier et second tour confondus – selon des données provisoires recueillies ce dimanche 16 octobre à 23h – a permis de porter la somme globale des dons à 4,8 millions d’euros. Soit un bénéfice net d’1,2 million qui apportera une confortable réserve de trésorerie pour couvrir les premiers frais du marathon présidentiel.

Les factures sécurité et publicité

Pourtant l’affaire n’était pas gagnée. Le budget global de 1,5 millions d’euros pour cette primaire a doublé avant l’été pour atteindre 3 millions d’euros. Avant de culminer à 3,6 millions d’euros, après avoir été revu à la hausse pour faire face aux difficultés à obtenir les listes électorales dans un format exploitable. Un surcoût que détaille Régis Juanico, député de la Loire et trésorier du parti, mis en place à ce poste par Martine Aubry :

La récupération des listes électorales aurait du nous coûter zéro euro. Seulement, cette hypothèse reposait sur le travail des mairies et nous avons du faire des efforts pour être sûr que nous aurions les documents à temps : pendant l’été, nous avons embauché trente salariés en CDD pour faire des relances là où nous avions des manques. Les documents nous arrivaient parfois dans des formats papiers et, là, il a fallu scanner massivement.

Le poste budgétaire le plus important de cette primaire revient ainsi à la gestion des listes électorales. En plus des 500 à 600 000 euros de récupération desdites listes, le PS a déboursé près de 700 000 euros de procédure de sécurisation. Les listes étaient en effet scellées avant l’arrivée au bureau, re-scellées après le premier tour, puis de nouveau après le second avant d’être transportées par camion à Paris pour être détruites. Une précaution incontournable pour éviter les contestations sur la confidentialité du scrutin.

Deuxième poste budgétaire : la publicité. Les encarts achetés dans la presse quotidienne régionale et nationale pour annoncer le vote ont totalisé 800 000 euros, soit plus du double du prix d’impression et d’expédition des 6 millions de tracts couleurs de quatre pages expliquant le vote (environ 300 000 euros).

Dépense, stratégique elle aussi : les 300 à 500 000 euros du stylo électronique qui permettait de récupérer les coordonnées des participants. Un coût bien mince au regard du fichier de contacts constitué au seul premier tour.

Dans l’organisation du scrutin, la fabrication des cartons électoraux, contenant le nécessaire au fonctionnement des 9500 bureaux de vote (bulletins, enveloppes, documents, signalétique, affichette) aura finalement représenté l’un des coûts les plus faibles : 300 à 400 000 euros.

Vite gagné

La cagnotte ne va cependant pas dormir longtemps dans les caisses. Une partie pourrait servir à indemniser les fédérations ayant eu à payer des frais de location de salle supérieurs à la moyenne.

Dès le départ, il était entendu que le scrutin étant en très grande majorité à la charge du national, les fédérations participaient en louant les salles, précise le trésorier du Parti socialiste. Nous envisageons néanmoins de compenser les départements qui ont payé plus que la moyenne.

Maintenant que François Hollande est désigné, les tacticiens du parti ont prévu de le proclamer dans les formes. Avec en particulier une convention d’investiture prévue le 22 octobre à la Halle Freyssinet à Paris, d’ores et déjà estimée à plus de 500 000 euros. En décembre, le Mouvement des jeunes socialistes verra ses journées de préparation à la présidentielle également financées par le Parti.

De quoi donner au Parti socialiste l’occasion de continuer d’occuper le terrain médiatiquement et politiquement avec plusieurs semaines d’avance sur la plupart des concurrents à l’élection présidentielle.


Illustrations par Loguy pour Owni /-)
Infographie par Loguy et Sylvain Lapoix

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