De quelle politique ce remaniement est-il le programme ?

Le 14 novembre 2010

Au delà des stratégies politiciennes, le changement de structure du gouvernement révèle les échecs de la politique sarkozyenne mais aussi des ambitions pour 2012.

Un peu à la manière des séries policières françaises de TF1 qui singent jusqu’au ridicule les recettes des « dramas » américaines, Nicolas Sarokzy a mal assaisonné le storytelling copié de Barack Obama : trop de mise en scène, trop de suspense fabriqué. Dans le dernier épisode que le président de la République nous a offert, le problème tient moins aux comédiens interchangeables qu’à l’histoire en général qui montre ses failles. Sous le régime actuel, le chef de l’Etat ayant tous les pouvoirs, la physionomie des ministères est plus révélatrice de sa stratégie que celle des figures qu’il y place. Et ce nouveau gouvernement se déroule comme un programme de renoncement, d’orientation et de projets.

Constat d’échec du Grenelle : bye bye l’écologie sociale

Plus de ministère d’Etat pour l’écologie : la présidence du G20 est arrivée, les prises d’otage se succédent et la défense prend la deuxième place du casting. Une légère touche “présidentielle” qui ajoute ce qu’il faut de sérieux à l’objectif de sécurité (surtout couplée avec un ministère d’Etat au quai d’Orsay). Quatre mois après la promulgation du Grenelle II, cette disgrâce de l’écologie sonne comme un constat d’échec : finies les promesses de relance par les technologies vertes et les discours ambitieux de lutte contre la « précarité énergétique » (le coût de l’énergie affectant les foyers les plus pauvres) qui avait eu un secrétariat d’Etat dans la précédente équipe . Nous revenons à une conception de l’écologie d’avant le Pacte de Nicolas Hulot : développement durable, transports, logement.

Même l’énergie vire au gris. A Bercy, elle est désormais sous l’autorité d’un ministre de l’industrie et de l’économie numérique, sorte de « secrétariat d’Etat à la croissance ». Plus d’engouement pour les technologies vertes auxquelles on dédiait hier un maroquin : après l’échec de Copenhague, la montée du scepticisme climatique, Sarkozy ne mise plus sur les mélanges économie et écologie. La ligne est bien tracée : retour au XXè siècle en matière d’écologie.

La santé, c’est le travail

Niveau social, la réforme des retraites a fait le ménage : avec la pénibilité comme point de focalisation du débat, c’est la santé toute entière qui a atterri dans l’escarcelle du ministère du Travail et de l’Emploi. Ce dernier volet ayant été déclaré « prioritaire » (aux côtés de la croissance et de la sécurité), Nicolas Sarkozy a dégagé la Famille pour faire de la place à « l’apprentissage et la formation professionnelle ». Une fusion parallèle à celle du Pôle emploi avec l’AFPA : emploi, indemnisation et formation professionnelle dans une même boîte. Vu les résultats obtenus par le Pôle emploi, on peut douter de la cohérence de la recette au niveau gouvernemental.

Pour savoir ce que sont devenus les jeunes, il faut désormais pointer au guichet « éducation nationale » : en dessous du ministre, un secrétaire d’Etat en a la garde, qu’il cumule avec la vie associative. En souvenir du bon vieux temps, « les solidarités » et la « cohésion sociale », valeurs aussi vides de sens que la « fracture » tant décriée par Jacques Chirac, héritent d’un ministère de bons sentiments tandis que Bercy hérite d’un ministère d’ambition : le social s’éparpille en « ministères pansements », des officines de guérison de la société plutôt que des organismes d’impulsion.

Dans ce patchwork, une ligne de démarcation apparaît entre les domaines où le Président considère avoir réussi et ceux où il change de direction : l’enseignement supérieur, l’économie et les finances, l’agriculture ont traversés des crises violentes, dont certaines durent encore mais leur périmètre se maintien, voire s’étend. Ce sont les beaux rôles. A côté, une poignée de mauvais rôles disparaissent : l’immigration réintègre le ministère de l’Intérieur, débarassée de l’identité nationale. Le secrétariat d’Etat aux libertés s’est lui aussi perdu dans les limbes avec la question des prisons. Plus de grands ministères d’ambition, seulement des bureaux fonctionnels accompagnant l’oeuvre présidentielle jusqu’à 2012. Ceux qui s’inquiétaient de la paralysie de l’action gouvernementale à cause du remaniement n’ont pas fini de se plaindre.

FlickR CC Vincent-7 ; Abac077 ; France.Diplomatie.

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